Grand garçon du Montana, David Lynch a d’abord été peintre. Le plus insolite des américains, le plus américain des insolites, Lynch était un homme d’uniforme. S’il préféra une mise restreinte, il ne cache pas son ‘émerveillement’ lors d’un hommage à sa costumière, Patricia Norris: ‘à chaque fois qu’une personne sortait de la loge, elle était le personnage, les vêtements étaient parfaits’.
On a souvent raconté l’histoire du garçon à l’accent pailleux, à la rigueur douce. Deux anecdotes le suggèrent peut-être mieux encore.
Jeune, il se présente pour être trésorier de son lycée. Son ami d’enfance Jack Fisk se souvient: ‘les autres garçons se présentaient en madras et chino; David est arrivé en basket de toiles et costume en seersucker. Cela ne choquerait personne aujourd’hui, de porter des baskets de toile avec un costume, mais à l’époque, personne n’y aurait ne-serait-ce que pensé.’
Guy Trebay, du New York Times, compare ses cheveux au profil d’Hitchcock ou à l’œillet de John Ford. Le réalisateur aura fini par s’habiller comme le premier et par jouer le second. Lynch a rarement accepté de faire l’acteur (‘je ne voulais pas voler à Harrison Ford et George Clooney leurs carrières’). Dans le film autobiographique de Spielberg, The Fabelmans, il apparaît pour donner un avis précieux au jeune réalisateur: ‘l’horizon en haut, c’est intéressant; l’horizon en bas, c’est intéressant; l’horizon au milieu, c’est d’un ennui mortel !’. Un représentant de l’Americana en campe un autre. Il reçoit son costume par la poste, le porte chaque jour avant le tournage, le porte pour peindre.
Entre ces deux dates, un uniforme se sera imposé. Un ‘chino’ de cotonplante cultivée en amérique du nord dès le xviie siècle More sable, une veste (‘Diriez-vous qu’elle est en général noire? Oui’), et une chemise boutonnée jusqu’au cou (toujours la même, une ‘planète’ blanche d’agnès b), portée sans cravate. De sa ville, il tient le plaisir des chinos Sears et des chemises Gant ou Brooks Brothers. De Francis Bacon, son ‘plus grand héro’, il hérite d’une main, d’un sens de la matière, et d’un goût pour les costumes de ville sombres, déshabillés par la chemise: couleur pour Bacon, boutonnage jusqu’en haut, poignets et longueur de vestes généreux.
La troisième saison de la série Twin Peaks terminée, il rentre à l’atelier. La mise se fait plus souple, le corps plus sec. Quelques chemises à carreaux; des pantalons de travail burinés. Le costume n’est pour lui pas tant un uniforme qu’un vêtement de travail. Lors d’un entretien pour Purple, Alex Israel lui demande en un mot: ‘Preppy?’. Et Lynch de répondre: ‘Oui, j’aime me sentir à l’aise dans mes vêtements de travail.’

LYNCH, David, dir. 1963.

LYNCH, David, dir. Los Angeles. 1986.

LYNCH, David, dir. HOPKINS, Anthony, act. Sur le tournage d’Elephant Man. 1980.

LYNCH, David, dir. Dans l’atelier. Los Angeles, 2018.

LYNCH, David, dir. KAREL, William, phot. 1984.

LYNCH, David, dir. Los Angeles, 1989.

LYNCH, David, dir. Sur le plateau de Twin Peaks. 1990.

LYNCH, David, dir. VESPA, J, phot.

LYNCH, David, dir. ROSSELLINI, Isabella, act. Las Vegas, 1998.

PARADIS, Vanessa, chant. LAGERFELD, Karl, mod. LYNCH, David, dir. CHARRIAU, Dominique, phot. Maison Européenne de la Photographie.
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