SWANN ET SES INSPIRATIONS

« Mais si l’on avait dit à ma grand-mère que ce Swann qui, en tant que fils Swann était parfaitement “qualifié” pour être reçu par toute la “belle bourgeoisie” avait, comme en cachette, une vie toute différente. Un jour qu’il était venu nous voir à Paris après dîner en s’excusant d’être en habit, Françoise ayant, après son départ, dit tenir du cocher qu’il avait dîné “chez une princesse” ». Marcel Proust, Du côté de chez Swann

Charles Swann est l’un des personnages centraux du roman en 7 tomes de Marcel Proust À la recherche du temps perdu. Figure du bourgeois mondain et cultivé, il traverse l’œuvre de part en part, du baiser maternel aux dernières pages du Temps retrouvé. Swann est aussi le seul personnage auquel est consacré un chapitre biographique débutant avant même la naissance du narrateur. Swann est une synthèse de multiples figures appartenant à l’entourage de Marcel Proust, des dandys de la Belle Époque qui gravitaient autour de l’écrivain.

CHARLES HAAS

Charles Haas est la principale source d’inspiration pour le personnage de Swann. Il est facilement identifiable à travers l’hommage final rendu par Marcel Proust où il le présente comme figurant sur Le Cercle de la rue Royale de James Tissot. Charles Haas se démarque par son élégance : il est le seul à porter la couleur. Le peintre le représente dans ce tableau vêtu d’un complet veston, un gilet marron, un pantalon à fines rayures gris, une canne à pommeau sculpté, des gants de chevreau caramel. Homme du monde, membre du Jockey Club, séducteur et cultivé, Charles Haas est le point de départ du personnage de Swann. 

WILLIE HEATH

La figure de Willie Heath, dédicataire du Recueil de poèmes et de nouvelles Les Plaisirs et les Jours écrit par Proust quelques années avant la rechercheauraitservi de source d’inspiration pour le personnage de Swann. Le 28 juin 1893, Paul Nadar photographie Willie Heath en jaquette et gilet, un œillet à la boutonnière, près d’une table où sont posés 3 livres. Il en existe deux versions : 

– dans la première, la main droite tient une canne et des gants ; la main gauche disparaît dans la poche d’un pantalon rayé et un chapeau haut de forme est abandonné sur la table

– dans la seconde, la main droite tient le chapeau ; la main gauche, la canne et les gants. C’est celle-ci que Heath offre à Proust.

JACQUES-ÉMILE BLANCHE

Jacques-Émile Blanche est le seul artiste ayant peint Marcel Proust de son vivant. Ils côtoyaient ensemble les salons littéraires, artistiques et mondains de la Belle Époque, aux seins desquels Blanche était reconnu comme le plus élégant de tous les peintres. André Gide raconte dans son Journal : « chaque fois que je rencontre Blanche, je sens tout aussitôt que je n’ai pas la cravate qu’il faudrait, que mon chapeau n’est pas brossé et que mes manchettes sont sales. Cela m’inquiète beaucoup plus que je ne vais le dire ».

MARCEL PROUST

Swann est enfin l’autoportrait du mondain et du dandy que Proust était lui-même. Le personnage fréquente les mêmes fournisseurs que l’auteur de la Recherche. Leurs chemises, taillées dans un voile de coton suisse, viennent de chez Charvet, leurs raglans viennent de Bond Street à Londres, leurs imperméables de Old England, place de l’Opéra. Jacques-Émile Blanche écrit : « Marcel, avec ses cravates de soie vert d’eau nouées au hasard, ses pantalons tire-bouchonnants, sa redingote flottante, tenant en main une canne de jonc, des gants gris de perle à baguettes noires, froissés, salis, un chapeau haut de forme incroyablement hérissé, à sa boutonnière se fanaient quelques orchidées ». Portrait de Marcel Proust en Jeune Homme

Charles Hass, détail du Cercle de la rue Royale par James Tissot.

Willie Heath par Paul Nadar, Paris, 1893. 

Marcel Proust, 1892.

André Gide, 1891.

Charles Ephrussi par Léon Bonnat, 1906.

Jean Cocteau par Jacques-Émile Blanche, 1913.

  • RAYURES : TENNIS, CRAYON, CRAIE ET ​​CORDE
    « La “rayure crayon” est une variante de la “pinstripe” que l’on trouve souvent dans les tissus de chemise, mais rarement dans les tissus de costume»
  • JAMES BALDWIN
    «Les couturiers y voient aussi l’endroit de leur singularité.»
  • LES HOMMES DE MODIANO
    «En miroir, c’est l’uniforme de Modiano lui-même qui se dessine.»
  • LES HOMMES DE JEAN-LUC GODARD
    « l’esthétique qualifiée de “French Mod” : des cols larges sur des chemises structurées, un peu de flair ici et une touche de cachemire là »
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