BACON – LEIRIS, PORTRAITS STYLISTIQUES CROISÉS

« J’ai vu souvent, autrefois, au fond du bar du Pont-Royal, à Paris, Leiris et Bacon ensemble, penchés l’un vers l’autre pour une conversation complice. J’aimais les regarder, Leiris sérieux, Bacon s’appliquant à l’être. »  Philippe Sollers, Les Passions de Francis Bacon.

Bacon n’a été reconnu en France que tardivement. Sa première exposition parisienne, en 1957, n’attire que les connaisseurs. Il faut attendre 1966, une exposition à la Galerie Maeght et le soutient de Michel Leiris qui signe la préface du catalogue d’exposition, pour lui permettre d’accéder à une plus vaste reconnaissance. C’est aussi le début d’une amitié indéfectible entre les deux hommes, reposant sur une admiration et un respect mutuel.

Un monde sépare pourtant le flamboyant Bacon, viveur et joueur, de Leiris, poète minutieux et ethnographe austère. Tout sépare la vie rangée de l’auteur de La Règle du jeu et celle véhémente et résolument « hors-les-mœurs » du peintre anglais. Mais Leiris continue de signer plusieurs catalogues d’expositions, de préfaces, d’articles et d’essais sur Francis Bacon, tandis que celui-ci peint un portrait à l’huile de Michel Leiris.

Cette amitié étonne de même par le style vestimentaire de ces deux personnages, aux antipodes l’un de l’autre.

BACON

La flamboyance de ses tableaux transparait dans son style personnel. En 1977, lors de son exposition à la Galerie Claude Bernard située rue des Beaux-Arts, Bacon assiste au vernissage vêtu d’un trench-coat en vinyle. Ayant son atelier à Londres, le peintre aime porter des complets taillés dans d’épaisses flanelles. À la fin de sa carrière, il semble s’assagir et porte des costumes croisés à rayures craies, qu’il détourne tout de même en l’associant à une chemise à larges rayures jaunes et bleues. Sorte d’accident volontaire et constant que l’on retrouve aussi dans ses oeuvres. Avec au poignet une Rolex gmt pepsi, il y a dans le style de Francis Bacon comme une envie d’exposer sa réussite, si tardivement reconnue en France.

LEIRIS

Le style de Michel Leiris est net, précieux et statutaire. L’écrivain et poète surréaliste emprunte l’élégance des grands bourgeois de la Rive Gauche. Il ne porte jamais de costumes croisés, lui préférant la sobriété des costumes droits qu’il choisit dans des tweeds écossais, d’épais draps de cachemire ou de lourdes flanelles. Dans Frêle bruit, Leiris consacre un passage entier à la description des tailleurs parisiens. Il relate des propos entendus chez Barrett, un tailleur de la rive gauche : « Ici, nous ne regardons pas ce qui se passe dans la rue, me dit un après-midi ce tailleur, affirmant ainsi l’orgueil aristocratique qui le portait à un dédain souverain de cette chose horriblement vulgaire, la mode, dont un honnête homme n’a pas à se préoccuper s’il tient le moins du monde à se placer au-dessus du commun ». Face au peintre anglais, l’élégance de Leiris est plus subtile et s’observe dans une multitude de détails : le placement haut de ses boutons de veste, le motif à chevrons de ses costumes ou la souplesse de ses cols de chemise.

However, both come together around a common vision, that of the costume as a tool for expressing and accepting one’s body, as Michel Leiris wrote in L’Âge d’homme : “it is necessary to build a wall around oneself, with the help of clothing”.

BACON, Francis. LEIRIS, Michel. 14 rue de Birague, Paris, France. [1970?]

GAILLARDE, Raphaël, phot. BACON, Francis, art. Paris, France. 1987. 

BACON, Francis. vernissage de la retrospective sur Francis Bacon. Grand Palais, Paris, France. 1971. 

LEIRIS, Michel. Galerie Claude Bernard, Paris, France. 1977. 

BACON, Francis. Galerie Claude Bernard, Paris, France. 1977. 

BACON, Francis, art. Portrait de Michel Leiris. huile sur toile. 30 x 25 cm. 1976.

FAUNIÈRES, Daniel, phot. LEIRIS, Michel. juillet 1966. 

MORHOR, Léo, phot. BACON, Francis. LEIRIS, Michel. Londres, Royaume-Uni. non daté.

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